Le cours de théâtre de treize heures était de tous mes cours celui qui avait toujours eu le plus de succès - du moins je n'avais que rarement la chance d'avoir autant d'élèves réunis. Ils étaient au moins, allez, une bonne trentaine ? On lisait sur leurs visages leurs sentiments avec autant de facilité que dans un livre, en tout cas le pensai-je : j'avais là une jeune fille stressée qui mordillait un crayon, un élève qui semblait perdu dans un bouquin, un qui discutait bruyamment avec son voisin, un autre qui préférait au contraire rester à l'écart en appréhendant la séance... Autant de personnalités si différentes et que seul le théâtre pouvait rapprocher ; c'était peut être une des raisons principales pour lesquelles j'avais choisi d'enseigner cette matière. Je jetai discrètement un coup d’œil à la pendule. Treize heures et deux minutes. Parfait, je pouvais commencer. J'ai pris la parole, non sans m'être éclairci la gorge auparavant.

- Hm. Bienvenue à tous à l'atelier de théâtre, et tout le blabla qui va avec. J'ai cru remarquer qu'on a quelques nouvelles vic...quelques nouvelles têtes, donc si vous avez un soucis, venez me voir. D'accord ? Non, ne hochez pas la tête ; je sais pertinemment que vous ne viendrez pas de toute façon. Bref, trêve de bavardage et commençons sans plus tarder par quelques minutes d'expression orale. Je veux que vous vous mettiez en binôme et je vais vous laisser quelques minutes pour préparer un court sketch que vous présenterez à vos petits camarades. Des questions ? ♪

Un silence de mort suivit ma tirade. Ah, ce que j'aime ces élèves.

- Allez, au boulot, ai-je ajouté, et tous se sont agités dans le but de trouver un partenaire.

C'est ce moment là qu'à choisit une certaine prof pour passer sa tête brune - avec une mèche bleue, s'il vous plait - par l'ouverture de la porte.

- Comment va ma sœurette préférée ? m'exclamai-je avec un grand sourire.

Les élèves allaient morfler, c'était certain. Décidément, les heures de pointe, c'était pas si plat.

Merci à Calyps pour le titre \o/

L'immense pendule sonna les 13 heures. Herregud* ! Mon rythme cardiaque palpite plus vite qu'une voiture de course. Monsieur Williams m'avait l'air bien sympathique, mais n'ayant entrevu et entendu qu'un court morceau d'une de ses discussions avec Mademoiselle Yukira, je n'en savais pas plus. Déglutissant avec une difficulté spectaculaire, j'attendis patiemment la minute où notre enseignant ferait bouger ses lèvres. Je capta un rapide coup d'oeil de la part du professeur de théâtre à la pendule : 13:02. Puis, semblant s'éclaircir la voix, il prit la parole :
"Hm. Bienvenue à tous à l'atelier de théâtre, et tout le blabla qui va avec. J'ai cru remarquer qu'on a quelques nouvelles vic...quelques nouvelles têtes, donc si vous avez un soucis, venez me voir. D'accord ? Non, ne hochez pas la tête ; je sais pertinemment que vous ne viendrez pas de toute façon. Bref, trêve de bavardage et commençons sans plus tarder par quelques minutes d'expression orale. Je veux que vous vous mettiez en binôme et je vais vous laisser quelques minutes pour préparer un court sketch que vous présenterez à vos petits camarades. Des questions ? ♪"
Les yeux écarquillés par une terreur croissante, il me fut impossible de dégourdir le moindre de mes membres. Figé, statufié, je ne savais que faire. COMMENT pouvais-je être en binôme ? Je ne connaissais personne ! Ne réussissant pas à conserver mon habituel masque "confiance en soi", je ne fis rien pour arrêter les perles salées légèrement bleutées qui me tombaient à présent sur les joues. Je fus également pris de petits spasmes, invisibles aux pupilles de mes "camardes" (j'avais bien remarqué que tout le monde me dévisageait méchamment...), puisque j'étais à la dernière rangée de sièges. Traumatisé que j'étais, je ne prêta guère attention à la parole de Monsieur Williams :
"Allez, au boulot."
Soudain, Madame Yukira vint dans la pièce. Heureux et ayant un un grand sourire aux lèvres, notre professeur l'accueillit avec une douce réplique :
" Comment va ma sœurette préférée ?"
J'avais peur. Sans le vouloir, je poussa un petit gémissement qui attira l'attention des autres élèves.
Oh, non...

*Mon Dieu.

Ne sachant quoi faire, j'entrepris d'aller rejoindre mon frérot chérie et l'aider à torturer quelques élèves durant son cours de théâtre.
Ayant entendu quelque rumeur sur une petite nouvelle du nom de Fildae Mely, je fit un détour par le grand hall. Et je la vis, tomber magistralement bien par terre, j'entrevu L*ptok, je la laissa faire son boulot de surveillante et m'éclipsa dans ma grande qualité de passe-partout personne ne me vit, pas même les deux criardes devant la bibliothèque que je n'avais pas ouverte ce jour là.
Bref. J'atteins la salle de théâtre quelques instants plus tard, mon frère avait (encore) oublié de fermer la porte de sa classe, je passais ma tête et tomba yeux dans les yeux de mon frère qui s'exclama :
" Comment va ma sœurette préférée ?"
" Très bien et toi mon cher frère ? Je ne te dérange pas pendant un cours j'espère ? " -ma question était intentionnellement posé pour embêter les élèves qui connaissait la réponse de mon frère-

Je remarqua le petit Ben au premier rang, abandonné, seul, il ne semblait connaître personne. Dans ma grande quiétude -et avant que mon frère réponde à mes premières questions- je demanda :
" C'est un cours en binôme si j'ai bien entendue ? Pourtant ta classe est un chiffre impair, dans ma grande générosité j'accepte d'aller avec Benichou ♥" -sincèrement, j'adore cet élève qui reste silencieux et n'a jamais osé me contredire, bref, le torturer un peu aujourd'hui me fera le plus grand bien puis lui donner des surnoms débiles m'amuse déjà-

« Très bien et toi mon cher frère ? Je ne te dérange pas pendant un cours j'espère ?
- Bien sûr que non, fais comme chez toi ! répondis-je avec un grand sourire.

Je vis l'attention de ma sœur se focaliser sur un élève au dernier rang. Un nouveau, il me semblait. Qui m'avait tout l'air d'être mort de trouille. Comme pour confirmer mon propos, il poussa un petit gémissement. Ooh. Celui-là allait bien me faire rire, je le sentais. D'ailleurs, Yukira semblait partager mon point de vue.
- C'est un cours en binôme si j'ai bien entendu ? Pourtant ta classe est un chiffre impair, dans ma grande générosité j'accepte d'aller avec Benichou ♥
Argh, ma sœur me piquait mes propres victimes ! Intolérable. Celui-là - Bendik, donc - j'étais le seul à pouvoir le torturer pendant mes cours. Elle avait qu'à se trouver un autre élève.
- Oh, mais je pense qu'il sera bien mieux avec...
Je parcourus les groupes d'élèves du regard.
- Avec Summer Hyrouma. Bendik et Summer Hyrouma vont travailler ensemble, répétai-je bien fort de façon à ce que les concernés entendent.
-Tu peux toujours passer dans les groupes pour aider les élèves, ai-je finalement ajouté pour ne pas vexer ma chère soeur.
De toute façon, vexée ou pas, mes élèves sont MES victimes. Pas touche, donc.

" Oh, mais je pense qu'il sera bien mieux avec Summer Hyrouma. Bendik et Summer Hyrouma vont travailler ensemble"

Je regarda le professeur d'un air hébété , il faut dire je m'attendais pas du tout à ce que le professeur prononce mon nom. Je ne pus pas m’empêcher de décortiquer tout les mots qu'il avait prononcé pour être sûr que je n'avais pas mal compris. Après réflexion en voyant son sourire en coin , j'eus la sensation qu'il fessait cela juste pour embêter sa soeur, et celle me parut vexée . Après quelques secondes je répondit en balbutiant : "D'accord monsieur!"

Le professeur s’exclama: "Tu peux toujours passer dans les groupes pour aider les élèves"

Il me sembla que celui-ci essayer en quelques sortes de dire de façon polie à sa soeur qu'il n'avait pas besoin d'elle.

" Très bien et toi mon cher frère ? Je ne te dérange pas pendant un cours j'espère ? "
Je vis les regards blasés de mes camarades. Bah quoi ? Qu'avait donc cette pauvre phrase ? Ne m'en préoccupant pas plus, et essayant de me cacher au maximum, j'entendis quelque chose qui me fit l'effet d'une bombe :
"C'est un cours en binôme si j'ai bien entendue ? Pourtant ta classe est un chiffre impair, dans ma grande générosité j'accepte d'aller avec Benichou ♥" Un silence des plus infinis prit alors place dans la grande salle. M’apercevant que beaucoup d'étudiants me regardaient avec pitié, je m'interrogeai : Était-ce la célèbre professeur tortionnaire de Mad School ? J'en avais tellement entendu parler. Pris de panique, je me mis à réfléchir intensément. Mon cher petit Bendik, il est temps pour toi de camoufler toute cette crainte derrière le masque que tu t'es si bien construit, me dit alors ma conscience. L'écoutant et prenant une fausse assurance, j'attendis d'avoir la suite des événements :
"Oh, mais je pense qu'il sera bien mieux avec... " Suspens. Alors, je n'étais donc pas avec Mademoiselle Yukira ? Bon, soit.
"Avec Summer Hyrouma. Bendik et Summer Hyrouma vont travailler ensemble." Monsieur Williams montra alors la fille nommée "Summer". A en juger par sa tête, elle ne s'attendait pas à être avec moi, et encore moins à entendre le professeur prononcer son nom. Je la comprends.
Je ne prêta guère mon écoute au reste de la réplique de notre enseignant, trop occupé à ruminer mes pensées. Qu'allais-je pouvoir dire à cette fille ? Comment pourrais-je engager la conversation ? Ahlalala...